La chronique de Lorinda Gnacadja
La main noire au sommet du fleuve , Florent Aïkpe et Xavier Zato, Editions Essaim Plumes
L'occasion est trop belle pour manquer de se souvenir.
En début d'avalanche d'indépendances africaines, David DIOP écrivit en 1956 un poème que longtemps ont déclamé nos pères, nos mères et nos aînés : Afrique
« Afrique mon Afrique
Afrique des fiers guerriers dans les savanes ancestrales
Afrique que chante ma grand-mère
Au bord de son fleuve lointain
Je ne t'ai jamais connue
Mais mon regard est plein de ton sang
Ton beau sang noir à travers les champs répandu
Le sang de ta sueur
La sueur de ton travail
Le travail de l'esclavage
L'esclavage de tes enfants
Afrique dis-moi Afrique
Est-ce donc toi ce dos qui se courbe
Et se couche sous le poids de l'humilité
Ce dos tremblant à zébrures rouges
Qui dit oui au fouet sur les routes de midi
Alors gravement une voix me répondit
Fils impétueux cet arbre robuste et jeune
Cet arbre là-bas
Splendidement seul au milieu des fleurs blanches et fanées
C'est l'Afrique ton Afrique qui repousse
Qui repousse patiemment obstinément
Et dont les fruits ont peu à peu
L'amère saveur de la liberté ».
Et comme une prédiction, la soixantaine passée, la liberté acquise garde toujours son amertume malgré la maturité des fruits du bel arbre.
« Toi, ô œil qui voit l'invisible !
Ô toi, ouïe qui entend l'inaudible...
Après ta lourde tâche salvatrice,
Te voilà sombrer dans ton profond sommeil de fier guerrier ! »
Xavier ZATO
C'est par cet hommage aux plumeurs qui étaient, qui sont et qui viennent que s'achève cette série de trentaine de poèmes équitablement répartis entre les deux auteurs autour d'un sujet qui les meut: l'Afrique.
La main noire au sommet du fleuve m'aura fait retourner ma carte de l'Afrique dans tous les sens pour finalement y voir la forme d'une main, croyant ainsi avoir compris le choix du titre porté par l'œuvre. Quoique, je n'en étais pas loin. Il m'a fallu parvenir à la 52ème de ses pages pour comprendre du magnifique poème éponyme l'action salvatrice de cette fameuse main. Même si de sa 4ème de couverture, elle en annonçait déjà les couleurs.
Florent AÏKPE
C'est l'histoire d'un piroguier...
" ... Sereine, une main noire au sommet du fleuve s'éleva.
Chair insufflant dynamisme et quiétude
Dans les narines tendues du nègre!
C'est l'Afrique dans son enracinement profond,
Génitrice du monde, qui régnera
Fière dans la Beauté et dans la Lumière."
Et comme une prédiction...
Un plumeur chantera l'Afrique, rien que l'Afrique. Tout de l'Afrique. Il choisira de rebondir dans sa coulée scripturale sur ses derniers mots d'un poème finissant pour déverser le suivant. De quoi retenir l'attention du lecteur tout au long de ses vers.
Un autre s'envolera parfois sur des thèmes de vie assez pinçant comme la mort ou le viol mais le lecteur se consolera bien vite par son humour dissimulé.
Et la grande joie de cette œuvre, une belle poésie, pleine de leçons, intitulée " La ruse du caméléon".
Les plumes sont sérieuses et travaillées avec autant de liberté et d'envolées. La surprise d'un acrostiche vous retiendra sûrement. En attendant, c'est à la danse que je vous invite, la danse de l'Afrique...
" Vrombis... Vrombis. Tambour! Tonne...
Tonne Tambour !
Noir je suis de sang Noir !
Fier descendant du noir !"
©Lorinda GNACADJA
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